[RP] Prémices de temps troublés

[RP] Prémices de temps troublés

1. Le maître charpentier

- « Un donjon plus fort ! »

Ces mots de l'Intendant résonnaient encore dans la tête du maître charpentier. Il avait été mandé au donjon de Saint-Félix afin de couronner le crénelage de l'édifice d'un hourd en bois.

Le donjon de Saint-Félix en partie couronné d'un hourd


En effet, le vieux donjon de Saint-Félix étant dépourvu de mâchicoulis, les crénelages supérieurs ne pouvaient, en cas de siège, présenter une défense efficace, puisque en tirant, les archers ou arbalétriers étaient obligés de se découvrir. Si l'assiégeant se logeait au pied même des murs, il devenait de toute impossibilité aux assiégés non seulement de lui décocher des traits, mais même de le voir, sans passer la moitié du corps en dehors des créneaux.
Ainsi, le hourd serait destiné à recevoir des défenseurs, hourd qui surplomberait le pied de la maçonnerie et donnerait un flanquement plus étendu, une saillie très favorable à la défense.

Avec ses compagnons, le maître charpentier se mît à l'ouvrage. Du haut du donjon, il pouvait appréhender la campagne environnante.

Le maître charpentier à l'œuvre


De là il voyait au sud-ouest le village de Vinassan et son château, et au sud-est celui de Marmorières. Ces trois forteresses verrouillaient stratégiquement les diverses entrées du domaine de Saint-Félix...
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Sources :
- VIOLLET-LE-DUC Eugène, Encyclopédie médiévale, tome 1, Architecture, « Donjon », celui d'Etampes, Bibliothèque de l'Image, Tours, réédition 2005, p. 409-413 ;
- VIOLLET-LE-DUC Eugène, Encyclopédie médiévale, tome 1, Architecture, « Hourd », Bibliothèque de l'Image, Tours, réédition 2005, p. 530-537.

2. Armer les hommes

Défendre le donjon contre d'éventuels agresseurs ne nécessitait qu'une poignée d'hommes. Ces hommes seraient en majorité des gens de traits, sûrement des archers, une quarantaine de professionnels si les finances le permettaient. C'est pour cela qu'un maître artillier avait été lui aussi mandé afin de fournir au donjon les arcs et traits nécessaires à sa défense.

a. Le maître artillier

Le maître artillier se mît à l'ouvrage.

Il confectionna des arcs courts de trois coudées - moins de 1,50 m de long - et simples dits « droits », taillés d'une seule pièce dans du bois d'if, ce qui les rendaient flexibles et rapides, et munis de cordes de chanvre.



Il fabriqua ensuite les flèches en grand nombre, car un archer professionnel entraîné depuis l'enfance pouvait tirer, à l'intérieur de hourds, jusqu'à 6 flèches visées à la minute ou 12 avec une précision réduite à une portée pratique jusqu'à 30 m en tir tendu. Chaque archer serait approvisionné en gerbes de 24 flèches. Le maître tailla ces flèches d'une longueur moyenne d'une coudée et demi - environ 720 mm - dans un bois de chêne. La flèche comporte quatre parties : le talon, qui comprend une encoche destinée à maintenir la flèche sur la corde jusqu'au décochement ; le fût ou la hampe, qui doit être flexible, car au moment du décochement la flèche se cintre en oscillant avant de rétablir sa trajectoire en ligne droite ; l'empennage, qui permet d'assurer la stabilité du projectile dans l'air et augmente sa portée grâce à trois empennes constituées de plume ; la pointe généralement en fer est goupillée à la hampe à l'aide d'une douille.



Le maître artillier goupilla diverses pointes :
- des poinçons pour percer les armures des hommes d'armes ;


- des pointes barbelées, car munies de barbes afin de rendre leur extractions plus difficile, afin de percer les faibles protections corporelles de la piétaille ou des manœuvres d'engins de siège ;


- des pointes incendiaires munies de quatre branches servant à maintenir l'étoupe imprégnée de poix et d'un carrelet en bout permettant à la flèche de se ficher dans les engins de siège à détruire par le feu ;


- des coupes amarres destinées à couper les cordages des engins de siège.


Le maître artillier fît le nécessaire pour satisfaire les besoins d'une quarantaine d'archers mais pour un bref siège.
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Sources :
- SERDON Valérie - préface de Philippe Contamine -, Armes du diable, arcs et arbalètes au Moyen Age, "Archéologie et culture", Presses Universitaires de Rennes, Rennes, 2005, 335 p.
- http://pagesperso-orange.fr/confrerie.arc/fleches.htm

b. Le maître heaumier

Le maître heaumier était maintenant satisfait. Six mois auparavant, un seigneur local lui avait commandé des casques appelés salades, et le maître heaumier avait honoré sa commande. Mais ledit seigneur se trouvait depuis endetté au point qu'il ne pouvait plus désormais payer ladite commande. Heureusement l'Intendant de la seigneurie de Saint-Félix lui acheta une partie de cette commande, ce qui l'arrangea grandement.

La commande ne concernait que des salades sans visières.

Salade d'archer


Les salades sans visières étaient destinées aux gens de pied et aux archers. Elles étaient forgées d'une seule pièce et consistaient en un timbre avec couvre-nuque prononcé. Deux courroies de cuir attachées sous le menton permettaient de maintenir ce casque fixe sur le crâne. Le visage restait complètement découvert.

3. Le maître d'œuvre

Le maître d'œuvre avait été embauché par l'Intendant afin de concevoir un ouvrage de défense à l'entrée de Saint-Félix : une barbacane.

Vue extérieure de la barbacane


Le maître d'œuvre était venu avec ses compagnons. Il avait reçu de la main d'œuvre supplémentaire des gens de la baronnie qui étaient désœuvrés.

La barbacane adoptait un plan classique semi-circulaire. Elle communiquait avec le chemin de ronde de la chemise du donjon - enceinte qui entoure un donjon, comme au château de Coucy. La barbacane protégeait la porte percée dans la chemise du donjon. La barbacane était ouverte à la gorge, c'est-à-dire ouverte vers l'intérieur, de manière à pouvoir être commandée par le donjon.

Vue intérieure de la barbacane


Autrement dit, si la barbacane tombait aux mains des assiégeants, elle ne leur serait d'aucune utilité, car toujours soumise aux tirs des gens de trait du donjon.
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Sources :
- VIOLLET-LE-DUC Eugène, Dictionnaire raisonné du mobilier, tome 2, Les armes médiévales offensives et défensives, « Salade », Heimdal, Barcelone 2004, p. 273-279.
- http://www.medievart.com/medievart/frame.html
- VIOLLET-LE-DUC Eugène, Encyclopédie médiévale, tome 1, Architecture, « Barbacane », Bibliothèque de l'Image, Tours, réédition 2005, p. 161-162.