[RP] Cérémonie de transmission de titres

Djahen a écrit:: Salutations, échanges polis, et même le début de la cérémonie, tout ceci était passé à mille lieues des préoccupations du Baron d’Axat car, pour une raison inconnue, la douleur familière venait de se réveiller et, lui crispant les mâchoires, l’avait contraint au silence…

Discrètement, il sortit de son aumônière une fiole et avala quelques gouttes du liquide qu’elle contenait. Son médecin lui avait prescrit cette médicamentation au plus fort de ses crises, et bien que la douleur soit encore tolérable, il ne voulait faire montre de faiblesse en pareille circonstances. Bien sur le produit n’était pas une panacée, il sentait déjà l’amertume envahir sa bouche et rendre sa mâchoire semblable à un lendemain de banquet, mais cette macération de Coquelicot d’or dans un fond d’eau de vie d’Angélique semblait avoir quelques vertus…
Mais certainement pas autant que le prétendait ce fichu apothicaire…

Avec raideur, il se dirigea vers le document, et, retirant sa chevalière, apposa son sceau sans laisser d’autre annotation que son nom…

Laisser de petits mots affectueux sur un tel document lui semblait quelque peu inconvenant de la part d’un homme, en fait, pour faire simple, il trouvait que ça risquait de le faire passer pour un mignon précieux et pour lui la chose était absolument impensable. D’ailleurs, ne pas laisser ce genre de notes ne retirait en rien l’estime qu’il avait du jeune Saint Félix…

Et lorsque la cérémonie serait achevée, il lui remettrait un petit objet, présent de son épouse et lui-même…

LLyr a écrit:: LLyr était resté en retrait pendant la cérémonie. S'il admirait celui maintenant n'était plus que Messire Rekkared pour son érudition, il appréciait autant son fils pour sa fougue et ses compétences, choses rares dans un royaume voué à plus ou moins breve échange aux guerres et au népotisme de bon usage.

Il les admirait aussi pour le lien qu'il y avait entre eux. Oh bien sur il connaissait le même de fils à père. Bien que ce dernier soit toujours en vadrouille en Orient ou il ne savait où vraiment.. Sur un bateau, quelques part dans un pays lointain à commercer. C'est le Lien Père Fils dans ce sens qu'il admirait surtout ; l'envie de vivre le même surement.

De nombreux nobles avaient déjà déposé leur scel sur le velin. LLyr approcha, laissa la flamme de la bougie lecher la cire et gratifia le velin de son scel.

Beaucoup de monde entourés les deux acteurs de la cérémonie. Il irait les voir après...

Louis Raphaël d'Appérault a écrit:: Lorsque le héraut de Languedoc convia les présents à signifier leur présence sur l'acte officiel de renonciation de titre, Louis s'approcha, retira la chevalière qu'il portait au doigt, présent de son père lorsqu'il avait reçut son premier fief. Sur celle ci figurait son sceau personnel, qu'il apposa sur la cire verte encore chaude, laissant apparaître les armes d'Offémont brisées. Et puis, il recula quelques peu, laissant d'autres passer à leur tour.

Les témoins avaient apposés leur seing ou scel au bas dudit acte d'abdication. Rekkared se leva alors, il souleva délicatement la couronne baronnale qui ceignait son chef & la posa tout aussi délicatement sur la tête de son fils en disant :

- « Nous, Rekkared de Síarr, en ceignant ainsi notre fils Cristòl de Síarr de la couronne baronnale de Saint-Félix, signifions notre renoncement définitif en sa faveur au titre de baron de Saint-Félix ainsi qu'aux droits & devoirs qui y sont liés. »

Puis Rekkared se dévêtit de la cotte d'armes frappée aux couleurs de Saint-Félix & en revêtit son fils. Enfin, il lui céda la place sur la chaire baronnale & se tint debout à sa gauche.

Le son du cor retentit une fois encore & la populace présente acclama son nouveau seigneur. Elle fût ensuite invitée à quitter la Grande Salle.

Les témoins purent ainsi donner leurs éventuels présents au nouveau baron de Saint-Félix.

Cristòl a écrit:: L'atmosphère, brassée par le défilé des témoins, les femmes d'abord, semblait-il, puis les hommes, avait perdu un peu de sa pesanteur, dans le bruit diffus de pas et de plumes, dans le mouvement des jupes, la rumeur des gens de Saint-Félix commérant sur la tenue de ces nobles hôtes... Et le souffle de Cristòl s'était fait régulier, calme, appaisé.

Soudain il n'y eut plus un bruit. Un court instant, même les gens de Saint-Félix, au fond de la salle, retinrent leur souffle. Et comme le dernier rayon de soleil du printemps s'effaçait des petits carreaux des étroites fenêtres, pour marquer le crépuscule d'un baron, le jeune homme à genoux devant tous, devant ce qui lui semblait être toute l'immense Aristotélité, bien qu'étant déjà au sol, crut qu'il allait trébucher. Le plus humble, le plus soumis et le plus dévoué des hommes, s'écrasant sous le poids de son avenir et surtout sous le plus droit, le plus puissant, le plus ardent des regards : celui du père, s'avançant, plus digne que jamais. Le fils ne voyait que les pieds qui quittaient le trône baronnial ; il devinait les mains qui s'élevaient, saisissant la couronne sur le chef qui la portait...
On aurait dit l'épée de Damoclès, menaçant la nuque du jeune seigneur. Quand elle tomberait, c'en serait fini de lui ; et c'était l'angoisse qui l'étreignait, véritablement, au plus profond de son coeur : que cette couronne étouffe sa vie, le fauche, l'oppresse dans un carcan de devoirs.
Jamais il ne l'aurait dit à son père. Il voulait trop lui faire honneur - mais le Cristòl des Monts Pyrénées était après mourir à petit feu, malgré les soins que prenait le jeune homme à entretenir la flamme vascillante dans le noir, et il s'en fallait de peu qu'elle ne s'éteignit. Sa terreur était qu'elle ne survive pas à la bourrasque qui allait changer son profil, à cette couronne, qui, s'abaissant peu à peu des nues, allait se fixer tout en haut de son être, et le précéder où qu'il aille. Ce serait « Place à Cristòl de Sìarr, Baron de Saint-Félix ! » et jamais il ne pourrait aller sans cet épithète.
Serait-il jamais pour quelqu'un simplement « Cristòl » ? Il se prit à rêver d'une douce amitié sans convenances ; d'une relation épurée, transcendant les rapports humains, il se prit à rêver d'être aimé.

Et la couronne rencontra sa tête.
Ses doigts se crispèrent contre la toile de son vêtement, contre ses cuisses, parce qu'il allait bientôt relever la tête, parce qu'il ne devait pas verser de larmes maintenant que tous allaient le voir. Etait-ce un bonheur ou un deuil ? Il y eut le bref discours de son père, et une étoffe glissa sur ses épaules, le recouvrant tout à fait. Que restait-il de l'ancien Cristòl ?
Il y eut un instant d'indécision, puis inspirant un grand coup, le baron de Saint-Félix se releva. Ses yeux clignèrent un peu sur son père, il déglutit dans sa tentative de sourire, et avança lentement, comme pour retarder ce moment, retenir encore le temps, vers la chaire, toute proche, dévolue au baron de Saint-Félix. Lui qui n'avait montré à l'assemblée que son dos de toute la cérémonie pivota avec une précaution infinie. Son regard vairon pouvait tout dire alors qu'il défiait l'assemblée - craintif, triste, colérique, ou résolument heureux.
Il s'assit.

Le son du cor retentit ; c'était Roland qui sonnait à l'arrière-garde, c'était Roland qui signalait sa mort. Rekkared, Baron de Saint-Félix, n'était plus. Cristòl, berger pyrénéen, n'était plus. A l'instar de l'aube, la clameur des gens de Saint-Félix, qui s'éleva pour célébrer la naissance d'un baron.

La ferveur populaire gagna Cristòl. Lui qui tremblait d'angoisse, lui dont le coeur agonisait, se sentit regonflé de la liesse de son peuple. Petit peuple que celui d'une petite baronnie. Mais enfin, il était leur seigneur, désormais. Qu'ils l'aimassent ainsi, que ce fût par méprise ou par foi, réconforta le jeune seigneur sur l'avenir - du moins pour le moment.

Skip a écrit:: Par réflexe, Skip s'était lever avec les villageois pour acclamer le nouveau Baron, y allant du Vivat! populaire. Le soldat était heureux d'avoir assisté à ce moment fort en émotion, qui ne sont pourtant pas terminer encore.

Le Ponot regarda les villageois quitter la grande salle sous les recommandations polies des gardes et en profita pour se rassoir. Il regarda autour de lui pour voir qui se lèverait en premier. Il ne voulait pas être ce premier, mais il jugeait important de donner le cadeau et d'expliquer le cadeau.

Pendant l'attente, il en profita pour extraire la petite boîte contenant la fiole de sa poche intérieur et la déballer un peu pour en vérifier l'état. Sa couleur rouge étincelante et la légère viscosité semblable au miel est en parfait état. L'emballage de fine toile qu'il a découpé et cousue de fils d'or par ses propres soins est aussi en bon état. Il l'avait placé dans un petit boîtier de fer dans lequel il avait disposé des brins de paille fraiche choisie et trié à même l'armoire à glace chez lui. Pour ne pas perdre d'avantage de fraîcheur il referma le tout soigneusement. Il garda la boîte sur ses genoux, attendant patiemment que quelqu'un se lève, espérant que quelqu'un aurait quelque chose à donner. Il ne voulait pas être le seul à avoir penser à un petit quelque chose.

Marguerite de Volpilhat a écrit:: Marguerite regardait son filleul assis sur la chaire. A quoi pensait-il ? Elle lui trouvait l'air noble, l'air de dominer le monde. Elle ne se sentait pas comme son amie, comme sa marraine, comme une Vicomtesse face à ce nouveau Baron. Sous son regard, qu'elle percevait droit et majestueux, elle se sentait son sujet, sa vassale.

Mais un regard suffit-il à dominer le monde ? Pendant le moment de flottement durant lequel les gens de Saint-Félix sortirent un à un de la Grande Salle, Marguerite se leva. L'ambiance changeait, le temps était aux félicitations, le protocole et sa majesté s'évaporaient.
S'approchant de la chaire, elle fut la première à remettre son présent au Baron de Saint-Félix. Un présent de femme, auraient dit certains...
Elle tendit un écrin un peu plus long que sa main, et l'ouvrit de telle sorte que son filleul pût en voir le contenu, sans qu'elle-même l'ait sous le regard : entre quelques volutes de soie noire se trouvait une simple broche de bois finement ciselée et polie ; une fleur dont les pétales seules étaient teintées d'un suave rouge sombre, un extrait de garance que le bois avait bu.

-« Mon filleul, vous serez sans doute le seul à comprendre la portée de ce présent, humble et sans richesse... mais qui nous lie, qui est un voeu que je fais pour vous, et un pour moi : vous êtes maintenant responsable de votre lignée, alors je vous souhaite de trouver la fleur qui la rendra pérenne.
Vous m'avez écoutée, vous avez cherché à comprendre ; vous m'avez forcée à donner des mots à ce que je ne m'expliquais pas. Aussi cette fleur, sur laquelle je n'ai jamais posé le regard, je forme le voeu de pouvoir la voir un jour, et simplement en sourire. »

Sans doute le sens de ces paroles sibyllines échappa à la plupart des personnes présentes. Peu importait, Marguerite n'avait rien trouvé de mieux ; c'était, pour elle, le plus beau cadeau que Cristòl pouvait recevoir de sa part. Une porte ouverte à ses secrets, et le voeu qu'il soit heureux.

Cristòl a écrit:: Qui d'autre aurait pu ouvrir le bal des présents que cette femme qu'il redoutait autant qu'il l'aimait ? Cette frêle fleur, cette altière femme, cette douce folle ! Cristòl n'avait pu encore lire ce que les invités avaient noté au bas de l'acte d'abdication de Rekkared, mais il était convaincu que Marguerite y avait été sibylline - et verrait plus tard qu'il se trompait.

Mais elle se rattrapait fort bien avec son présent. La première réaction du jeune homme, lorsque l'écrin fut entrouvert, fut de sourire : « Elle est guérie. »
Une fois encore, il se trompait, et le comprit dès les premiers mots de sa marraine, bien avant qu'elle ne précise qu'elle n'avait jamais vu la broche.

« Vous êtes maintenant responsable de votre lignée, alors je vous souhaite de trouver la fleur qui la rendra pérenne »

Cruelle, cruelle ! Etait-ce une allusion à peine voilée à la discussion qu'ils avaient tenue quelques longues minutes plus tôt ? « Responsable ». Ce mot qui tentait de tuer le berger pyrénéen, qui luttait, cherchait à l'étrangler. Et la fleur, la Fleur... Se jouait-elle de lui ? Il la savait trop charitable et trop honnête. Mais les mots tombaient sur son coeur comme des larmes de verre.

Il saisit avec précaution la précieuse boîte, posa un regard sans appel sur le bijou de bois, et referma le couvercle. Ses yeux vairons lui donnaient un air étrange, lorsqu'il répondit, d'une voix qu'il voulut ferme - mais il butta sur les mots, et le ton de sa voix s'éteignit sur la fin :

-« Ces voeux, je les formule également, Vicomtesse, ma chère marraine : vous guérir, et faire honneur à mon père, en suivant ses volontés pour mon avenir. Il n'y a rien qui soit plus important à mes yeux. Votre présent représente la foi en cet avenir ; merci de tout mon coeur de me la faire partager. »

Oh, le jeune homme aurait eu bien d'autres choses à dire... Mais il s'en tenait à ce que tout le monde pouvait entendre, à ce qu'il osait, et déjà le faisait frissonner. Le reste serait son secret. Il fixa un court instant la rousseur de la Fleur d'Oc, puis détourna la tête, comme si ce feu brûlait sa rétine. Son regard se posa sur Clémence ; il crut commettre un sacrilège. Ses yeux glissèrent sur Louis-Raphaël, s'arrêtèrent sur sa mère, au premier rang ; il sourit.

Skip a écrit:: Skip, voyant Marguerite retourner à ça place, décida qu'il était maintenant son tour de se lever. Il prit son courage à deux mains, ainsi que la boite de métal, et prit l'allée central pour se diriger d'un pas fier et droit vers le trône. Il monta les quelques marches de l'estrade et s'agenouilla devant Cristòl, tendant le boîtier à celui-ci et lui laissant le soin de l'ouvrir. Il expliqua en même temps le cadeau.

-Senhèr Cristòl de Siàrr, Bar de Sant Félix, voici un présent voué à la sagesse et à la longévité. Je sais que vous ne me connaissez que très peu, mais sachez que j'ai un énorme respect pour vous et votre père.

Dans ce boîtier vous trouverez une fiole d'un élixir de ma composition, gardé au frais dans ce boîtier garnie de paille de glace et habillé de la plus belle toile mise à ma disposition. L'élixir n'a été confectionné que pour vous et personne ne pourra en profiter autre que vous. Elle vous procurera force et vigueur ainsi que tempérance et sagesse. Une seule goûte de cet élixir dans votre meilleurs vin suffit. Il vous faudra, par contre, toujours la garder au frais. Il y a, dans cette fiole, assez pour tenir 6 mois. Je pourrai vous en refaire d'autre le moment venue.

Avec ce cadeau, je vous offre aussi mon amitié et mon conseil. Il est toujours bien, pour un grand seigneur, de s'entourer de bon apothicaire et sachez qu'il serait pour moi un honneur de vous servir en tant que tel, si vous acceptez mon offre, bien entendu.

Skip prit une pose et regarda Cristòl dans les yeux.

-Quel que soit votre décision, la fiole sera vôtre... mon ami.

Le soldat baissa les yeux, mais garda la tête très haute, tel un digne soldat de la glorieuse OST du Languedoc.

Cristòl a écrit:: Tant d’aplomb face à tel élixir de jouvence aurait sans doute bien fait rire un médecin du troisième millénaire. Cristòl, lui, réagit tout autrement ; car il n’avait pas été élevé par une vieille paysanne en vain. Il gardait dans tous ses jugements une once de superstition, et la foi en la parole des gens qui semblent dire avec honnêteté qu’ils s’y connaissent. A cela, ajoutons qu’il tenait les plantes en haute estime, bien que connaissant davantage celles pour soigner les bêtes.
Il ouvrit et eut un regard mi-amusé, mi-désolé, eut égard à la discussion qu’il venait de tenir avec sa marraine, à la vue de la couleur de la fiole, d’un rouge vif, lisse, enveloppant. Mais ce sentiment spontané n’avait rien contre la fiole elle-même et c’est avec un sourire résolument bienveillant et reconnaissant qu’il répondit au Garde d’Argent, qui l’avait fixé dans les yeux, avant de les baisser :

-« J’accepte de tout cœur votre amitié et votre conseil, Skip, et ma reconnaissance m’invite à vous dire mon ami. J’ai les plantes et leurs vertus en très haute estime, et j’admire la médecine, si je ne la pratique point moi-même.
Votre présent m’accompagnera, m’aidera dans mes moments de faiblesse, comme le ferait l’ami qui l’a préparé. Et ce serait une joie que de pouvoir dire que vous êtes l’apothicaire de Saint-Félix. »

Il ne savait s'il devait tendre la main au Garde, pour l'inviter à se relever, ou s'il devait attendre... Encore des choses qu'il lui faudrait apprendre. Mais comme il n'était pas un homme froid, et malgré le doute qui le rongeait, il résolut de faire le signe d'amitié que lui dictait son coeur. Se levant lui-même de la chaire, il tendit la main à Skip, pour qu'il se redresse.

Skip a écrit:: Skip regarda Cristòl se lever et lui présenter une main. Le soldat en fit donc de même et lui serra la main d'une poigne ferme. Un sourire respectueux aux lèvres, Skip fit une petite révérence.

-Ne vous en déplaise, mais la joie est toute entière pour moi, mon ami.

Skip ramène son autre main pour enserrer la main toute entière de Cristòl en lui souriant franchement et sereinement. Il fut tenter de le prendre dans ses bras, mais la circonstance et le lieu ne s'y prêtait pas. Skip lâcha donc la main du baron et lui fit un salut réglementaire, dû aux hommes de mérite, et tourna les talons pour aller reprendre place. Le protocole tirera bientôt à sa fin et les festivités pourrons enfin commencer. Ce sera surement l'occasion rêver de ce faire mieux connaître au près des autres invités.

Cristòl a écrit:: Cristòl reçut l'étreinte des mains de Lo Casalier avec bonne humeur, et le regarda s'éloigner pour retourner à sa place. C'était la compagnie de tels hommes, sans artifices, qu'il préférait parmi toutes, qu'il préférait même à celle, pourtant bien douce, des femmes et de leurs manières affectées, gracieuses quand même.

Et comme son père était à ses côtés et qu'il ne pouvait le voir qu'en tournant la tête, c'est encore une fois sur sa chère petite mère qu'il reposa le regard.

Se fût au tour du père d'offrir un présent à son fils. L'équipement militaire coûtant cher, Rekkared désirait offrir à son fils la lame qui l'avait protégé jadis :

- « Fils, jadis mon père, votre grand-père, lorsqu'il me donna en oblat, me confia un présent que je considère comme relique. Je l'ai porté en pendantif jusqu'à mon anoblissement où je pus porter l'épée au côté. Cet objet servit à graver la rune inscrire à la naissance de la gouttière de cette épée. »

Rekkared présenta alors à son fils l'épée que lui apporta un écuyer & lui indiquant la rune , il dit :

- « La rune inscrire est celle nommée sōwila, seizième rune de l'alphabet germanique runique ou futhark & la première lettre de notre nom Síarr. Elle se traduit par "seul" ou "indépendant", c'est pourquoi elle figure seule sur la lame de cette épée. Elle symbolise la perfection, comme cette lame que celui qui la forgea a voulu qu'elle soit. [1]

L'objet qui inscrivit cette rune dans l'acier est renfermé dans le pommeau de cette épée. Il s'agit du poinçon qu'utilisait mon grand-père, votre arrière-grand-père, pour apposer son seing sur ses œuvres de métal. Oui, votre bisaïeul était le dernier d'une longue lignée de maître de forge, & ce poinçon en est le seul souvenir, avec notre nom. Ce nom Síarr dérive de celui d'un des nains habitant la pierre, Sviar, figurant dans les récits mythologiques nordiques de l'Edda poétique, & dont la signification en norrois n'est autre que "celui-qui-fait-des-étincelles", autrement dit, forgeron... Voilà cette part d'héritage que je vous confie, comme jadis mon père me la confia de son vivant. [2]

Je souhaite que cette épée contribue à votre excellence dans les combats que vous aurez à mener au cours de votre vie de baron. »
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Sources :
[1] Rune ; Sōwila ; Musset Lucien, Introduction à la runologie, Bibliothèque de philologie germanique, CNRS, Paris, 1965 ; Wolfgang Krause, Les runes ou l'écriture des vikings ou des anciens Germains, "Patrimoine de l'Europe", Editions du Porte-Glaive, Paris, 1995.
[2] Dillman François-Xavier (tr. du vieil islandais, introduit et annoté par), L'Edda, récit de mythologie nordique par Snorri Sturluson, "l'aube des peuples", Gallimard, 1991 ; Gould Chester Nathan, « Dwarf-names : a study in old Icelandic Religion », Publication of the Modern Language Association of America, vol. XLIV, n°4, 1929, p. 953 ; Lotte Motz, « New Thoughts on Dwarf-Names in Old Icelandic », Frühmittelalterliche Studien, 7, 1973, p. 100-117.

Cristòl a écrit:: Cristòl appréhendait ce moment, le moment où le legs serait articulé, vocalisé, incarné non plus par la couronne, qui n'était que le symbole d'un titre, mais par l'épée, symbole du pouvoir et du devoir. Plus encore, le voilà qui héritait du trésor familial, pour ainsi dire ; ce qui faisait l'âme et la pérennité de la famille de Sìarr...
Chaque étape de la cérémonie était une marche de plus vers cette effrayante indépendance - responsabilité. Cristòl avait la gorge serrée, et fixait son père, mains jointes tournées vers le bas, dans l'attitude de l'enfant qui écoute, appliqué, une leçon particulièrement importante. Et rien n'était plus vrai, puisque depuis tant de mois, près d'un an et demi que le fils avait retrouvé le père et s'était placé sous son enseignement, jamais il n'avait su, ni même ne s'était demandé, si son nom avait une signification. C'était déjà beaucoup de retrouver un père et une mère, et le fils n'avait jamais songé à s'imaginer toute la famille, tous les ancêtres qui avaient fait son sang, et l'histoire qui le liait à eux.

Il se pencha sur la rune, qui revêtit un caractère sacré dès l'instant que son père la désigna comme porteuse de l'histoire familiale - et sa conservation comme garante de la pérennité de la lignée. « Seul ». Rekkared avait longtemps été seul, avant de retrouver Carmen ; sur la fin de sa vie, l'errance d'ermite était encore un signe de cette solitude vers laquelle les Sìarr revenaient tout le temps. Surprendra-t-on encore le lecteur en lui parlant des longues années d'isolement bucolique qu'avait vécues Cristòl dans les Monts Pyrénées ? Maintenant, il était Chevalier... Et la chevalerie était encore une solitude, un chemin sans fin, une errance au service du bien.
Mais peut-on vivre seul, toute sa vie, et ne jamais le regretter ? Le jeune baron savait combien il lui faudrait vivre dans le monde et dans la foule, où le son de son flageolet serait banni, pour faire honneur à son père.

Il lui fallait, lui, Cristòl le Forgeron, Cristòl de Sìarr, battre le fer de sa vie, l'armature de ses rêves, la droiture de ses espoirs.

Ses doigts forts, de ces doigts qui avaient dans le passé tondu des brebis et bâti des clôtures, se refermèrent sur le pommeau de l'épée baronniale, dans laquelle se trouvait l'héritage de tout son sang. Les Sìarr, si nordiques... Et lui, si méridional... Pourrait-il en être digne ? La question sans cesse revenait, obsédante, aliénante. Finalement, se rappelant ses leçons de latin, et ne parvenant à prononcer autre chose, articula en guise de remerciement à son père admiré, adulé, monument d'érudition que Cristòl craignait de perdre :

-« Non fui, fui... E fructu arbor cognoscitur. »

Et il espérait toujours appliquer cette devise, la vérifier, la prouver aux yeux de tous... Tâche ardue, assurément.

LeGueux a écrit:: LeGueux prit le vélin gratouilla quelques mots dessus, et commença à faire couler la cire.

Avant d'apposer son scel il regarda une dernière fois le père et le fils.

Cristòl a écrit:: La nouveau baron leva ses yeux sur le héraut, son parrain et maître. L'atmosphère de l'air était comme suspendu, diaphane, un nuage de pensées et d'effluves nouvelles.
Etait-ce un pouvoir nouveau qui lui donnait cette ivresse ? Assurément non - Cristòl n'était pas de ceux que le pouvoir attirait de cette façon. Pour lui, le pouvoir n'était qu'un devoir.

Il sourit de nouveau. A Clémence de l'Epine. A Marguerite Corteis de Volpilhat. A Paule-Stéphie Villa Lobos Sanchez Ramirez d'Alanha. A Marie Douce Shaggash de Donazac d'Exat. A Louis d'Appérault. A Djahen Shaggash de Donazac d'Exat. A Skip lo Casalier. A Llyr di Maggio d'Astralgan.

A Carmen de Sìarr. A son père.

Il réalisa soudain la reconnaissance qu'il avait pour tous ces gens, d'être venus, pour tout ce qu'ils lui avaient apporté, et tout ce qu'ils représentaient d'espoir et d'avenir. Il songea aux Pensées de Marc Aurèle, avec lesquelles il avait appris le latin. Ne commençaient-elles pas par une litanie de reconnaissance ?

LeGueux a écrit:

LeGueux regarda le père, puis croisa le regard du fils. Un instant. Puis un sourire se fait jour sur ses lèvres, et il appose son scel sur la cire encore molle. Ne resterait plus qu'à le faire enregistrer par Phylogène.

Citation :

Citation :: Nous, Rekkared, anachorète à l'ermitage de Saint-Antoine de Galamus, en Corbières

à vous, membres de la noblesse & Roy d'armes de France, & vous mon fils, Cristòl, qui présente lettre verrez,

salut.

La majesté divine ayant bien voulue, par son infinie miséricorde, mon cher fils bien aimé, me faire connaître, depuis quelques temps, le néant du monde et la vanité de ses grandeurs, & de nous donner en même temps un désir ardent des biens éternels, qui doivent, sans comparaison, être préférés à tous ceux de la terre, lesquels sa majesté ne nous donne que pour cette unique fin : nous avons cru ne pouvoir mieux correspondre aux faveurs d'un si bon Père, qui nous appelle pour le servir, qu'en lui sacrifiant & en mettant à ses pieds cette couronne baronnale pour penser uniquement à le servir, pleurer nos fautes, & nous rendre moins indignes de comparaître en sa présence, quand il voudra bien nous appeler à son jugement.

Nous avons pris cette résolution avec beaucoup plus de ferveur, quand nous avons vu que Carmen, que Dieu, pour notre bonheur, nous a donné comme épouse, entrait en même temps dans les mêmes sentiments & était résolue avec nous, de mettre sous les pieds le néant des grandeurs et des beins périssables de cette vie. Nous avons donc résolus, tous les deux, de mettre en exécution ce dessein & nous le mettons en œuvre aujourd'hui, ce XXIe jour de décembre, début notre hiver, avec d'autant plus de plaisir que nous remettons ladite couronne baronnale entre les mains d'un fils que nous aimons avec une extrême tendresse, digne de la porter.

Oui, notre cher fils, vous devez bien connaître tout le poids de cette dignité & penser à la remplir en tout ce qu'elle vous oblige.

Nous prions Dieu de tout notre cœur, notre très cher fils, pour qu'il vous accorde la grâce & vous comble de tous les dons dont vous aurez besoin pour le gouvernement de la baronnie de Saint-Félix, qui est maintenant vôtre, afin que nous puissions avoir la consolation d'entendre dire dans notre retraite, à l'ermitage de Saint-Antoine de Galamus, que vous êtes un grand baron. Quelle joie ne sera-ce pas pour un père qui vous aime & qui vous aimera toujours tendrement !

Et nous espérons que vous conserverez, toute votre vie, les mêmes dispositions que je vous ai connues jusqu'aujourd'hui.

Pour que la sincérité de notre abdication obtienne une vigueur plus ferme pour les temps à venir, nous avons décidé de la confirmer par notre main et de la signer pour une dernière fois par l'impression de notre sceau, dont la matrice devra brisée afin qu'elle ne puisse jamais resservir.

Rekkared, ex-humble baron de Saint-Félix près de Vinassan en Narbonnais, ex-seigneur de Vinassan, a écrit et ratifié,

Date en l'enceinte du donjon de Saint-Félix près de Vinassan en Narbonnais, le samedi XXIe jour de décembre de l'an MCDLV [vendredi 21 décembre 2007].

Qu'il puisse en être ainsi, heureusement.

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Nous, LeGueux d'Alanha, dich Lengadoc, héraut de marche du Languedoc, en laquelle est sise la baronnie de Saint Felix de Vinassan,

à tous et toutes que le présent acte liront,

Attestons que cérémonie publique fut effectuée devant foule et témoins,

et notamment en présence de messer Llyr di Maggio, dit Touraine, donà Polstéphie d'Alanha, messer Louis Raphaél et dona Marguerite d'Appérault, donà Maridouce et messer Djahen Shaggash, de donà Clemence de l'Epine ainsi que de sieur Skip, qui ont en outre paraphé le present acte, ainsi que de la mienne.

Validons et contresignons le dit acte de cession,

Disons que désormais Messer Cristòl de Siàrr est seigneur titulaire de la baronnie de Saint Félix de Vinassan, sise en Languedoc.

Apposons notre scel afin que nul ne puisse contester la validité du present acte.

Qu'aristote garde le père et le fils en sa sainte garde.

Fach en Sant Feliç de Vinassan lo tercen de Juhn de l'an de pascas 1456.
[RP] Cérémonie de transmission de titres - Page 3 Sinoplege4

[RP] Cérémonie de transmission de titres - Page 3 Sinoplege4

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Sources d'inspiration : lettre d'abdication de Philippe V en faveur de son fils aîné Don Louis, le 14 janvier 1724.

Delfin Blausac a écrit:: De tous les habitants de la baronnie, un seul n'avait pas quitté la pièce après les vivats. Delfin Blausac, un quadragénaire qui avait roulé sa bosse, et montré bien des qualités dans la gestion d'un domaine, restait, debout, silencieux, près de la porte. La barbe grisonnante du vieux loup qui commence à être sage, le cou massif comme celui d'un bœuf, le regard vif perdu sous quelques rides et les mains burinées par le soleil et le travail confirmaient qu'il était de ceux qui dirigent avec fermeté les affaires, sans faillir. Pour lui, cette cérémonie ne changeait rien : pour un baron comme pour l'autre, il était l'intendant de Saint-Félix.

A la seule différence que cet enfant, débarqué un jour de printemps dans son quotidien, n'était rien pour lui. Peut-on, en si peu de temps, se faire à l'idée qu'un héritier existe, déjà bâti comme un homme, alors qu'on ne l'a jamais vu ?
Delfin connaissait bien sûr Cristòl. Depuis de longs mois, il avait été en contact avec lui, lui avait montré le domaine, et quand Rekkared était parti en ermitage, l'avait géré pour lui et selon ses directives.

Mais ce garçon était trop timide, trop distant ; l'intendant n'était pas certain que ce caractère convienne pour asseoir son autorité.

L'avenir le dirait.